Son article n’avançait pas. Assise, depuis deux heures déjà (bien qu’après la première demi-heure, sa notion du temps s’était déjà de moitié amenuiser), elle s’adonnait à un manège incessant : écrire, relire, reformuler et effacer. En éternelle perfectionniste, il lui était incapable d’avancer dans son article si le début de ce dernier n’était pas parfait. Et dieu seul sait que Noga pouvait passer des soirées, voir des jours entiers sur une banale phrase d’accroche. Aussi lorsque son regard croisa le cadran lumineux disposé au dessus de son bureau elle se contenta d’hausser les épaules, nullement étonné de l’heure tardive qu’affichaient les chiffres rouges écarlates. Dans un soupir elle tenta une énième tentative. Ecrire, relire, reformuler et effacer. Merde maugréa t’elle en cliquant frénétiquement sur la petite croix qui l’appelait, la hélait, la suppliait depuis que trop longtemps déjà. Noga avait besoin d’une pause. Un verre de blanc l’aurait certainement détendue, malheureusement elle n’était plus à Vancouver. Mais à Camrose. Son Camrose. Si au début elle s’était montré réticente à accepter la proposition faite par son patron, très vite l’envie de retrouver ses racines l’avaient emportés. S’en était suivie celle de renouer le contact avec Raleigh et Myra. Bien qu’elle s’écriait à longueur de temps se ficher de la distance qui pouvait les séparer, force lui était de constater qu’elle s’était étrangement euphorique en retrouvant ces derniers. Balayant ses pensées dans un profond soupir, Noga entreprit de rejoindre la cuisine. A cette heure, celle-ci baignait dans un silence morbide. Une ambiance bien étrangère à celle qu’elle revêtait en semaine, habituellement la cuisine grouillait de monde et une forte odeur de café bon marché en émanait. Malgré tout l’ambiance y était conviviale. Un peu trop même parfois. Sa tasse en main, la jeune femme se dirigea vers son bureau quand une faible lumière frappa son attention. Sourcils froncés elle tourna les talons, décidé à savoir qui pouvait bien se trouver dans le bâtiment à cette heure aussi tardive. Arrivée à la porte du bureau illuminé, la jeune femme ne pu s’empêcher de sourire. Machinalement elle se cala contre l’embrasure de la porte. Moran, je sais que je te plais, mais je ne te savais pas stalker dans l’âme insinua t’elle, un sourire taquin étirant ses lèvres. Noga éprouvait un certain plaisir à agacer, horripiler le jeune homme. Quand on lui demandait si Moran était susceptible de lui plaire, elle se contentait de lâcher un rire hautain et d’afficher une semi grimace de dégout. Attitude exemplaire de la jeune femme qui baigne dans le déni, intimement Noga ne pouvait nier l’attirance qu’elle éprouvait face à son collègue. Mais de là à l’avouer. Café ? demanda-t-elle en agitant sa tasse de gauche à droite. Sans attendre une réponse de la part du jeune homme, Noga enchaina. Tu t’en sors de ton coté ?